“Contribution pour une législation urbaine adaptée aux villes africaines pour améliorer notre cadre de vie ». Une communication de Monsieur Alioune Badiane, économiste, planificateur urbain Président de TUTTA, présentée à l’occasion de la journée mondiale des villes célébrée à Dakar le 31 octobre 2019.

Plus de la moitié de la population mondiale vit aujourd’hui dans les villes. Ce chiffre devrait atteindre 68 % d’ici à 2050 ! En Afrique c’est 42% de la,population qui vit aujourd’hui dans les villes et les centres urbains.

Les villes sont des moteurs de croissance économique : elles fourmillent d’idées, de commerces, de projets scientifiques, d’innovations… Bien planifiées et organisées, notamment grâce à des méthodes de planification et de gestion intégrées, elles peuvent favoriser le développement à long terme des sociétés sur les plans économique, social et environnemental.

Face à la situation actuelle de l’urbanisation en Afrique et du niveau  élevé de l’ informalite, de la précarité ambiante , et du  désordre dans nos villes et zones urbaines ,il ya urgence pour un sursaut collectif,pour une bonne gouvernance des villes et des territoires  si nous voulons tirer partie des avantages qu’offre l innovation pour  un développement urbain organisé et maîtrisé de nos villes. La célébration de la journée mondiale des villes  de cette année 2019 nous offre une opportunité pour lancer un appel pour une prise de conscience de l état de délabrement de nos villes et communautés et pour une nouvelle citoyenneté et pour une action collective pour y faire face.

 A la suite des appels lancés par les Nations Unies et notamment par l ONU Habitat et la Commission Economique pour l Afrique , l Union Africaine reconnaît que l’urbanisation est un phénomène à long terme qui façonnera le développement de l’Afrique dans les années à venir et que les multiples voies de la transformation structurelle ont toujours connu une augmentation du degré d’urbanisation. Aujourd’hui l’Afrique compte une population totale de 1,3 milliard d habitants dont 43% vivent en zone urbaine soit une population urbaine plus de 550 millions.

En outre, l’Union africaine souligne que l’urbanisation implique des interactions spatiales importantes au niveau national, régional et local ,susceptibles de créer des opportunités de croissance transformatrices pour l’Afrique, mais elle pose également de sérieux problèmes de peuplement, de dysfonctionnements et de difficultés d application des lois et des règlements .  En effet comme une bonne partie de la population qui migre  des zones rurales vers les villes sont sans instruction ou peu instruits  et sans une qualification professionnelle , ils se retrouvent dans le secteur informel,tres peu soucieux de la réglementation,qui représente 93% de tous les nouveaux emplois et environ  61% des emplois urbains en Afrique. Les revenus du secteur informel étant, de par leur nature même, faibles et intermittents, la plupart des migrants cherchent naturellement des abris ou deviennent des locataires ou propriétaires de logis précaires dans les bidonvilles. C est ici qu’au Sénégal , le programme Zéro Bidonville-PROZEBID initié par le ministère de l’urbanisme de l habitat de l hygiene publique trouve tout son sens en terme d ambitions et de volonté etatique !

Aujourd’hui face à la croissance désordonnée des centres urbains , de nombreuses villes africaines doivent faire face non seulement à la prolifération des bidonvilles mais aussi à l’insécurité et à la criminalité croissantes. La faiblesse des institutions a contribué à une mauvaise application de la législation urbaine, entraînant des dysfonctionnements des marchés fonciers et du logement, ce qui a provoqué une prolifération d’établissements informels et des défis pour une application effective de la législation.

Les villes et les concentrations urbaines  permettent une mobilisation populaire des innovations technologiques et une spécialisation dans divers domaines, notamment les transports, l’éducation et la santé. Les pôles urbains et leurs installations industrielles peuvent améliorer l’offre  de travail pour les jeunes  ,la productivité nationale et régionales et accroître les capacités à  l’exportation.

Mais les zones urbaines posent également de sérieux problèmes, notamment en matière d’aménagement du territoire, de méthode de planification , de gestion foncière et d’accès au  logement, aux infrastructures, notamment de mobilité, d’électricité, d’eau et d’assainissement, et de services, notamment la lutte contre la pollution, les inondations et surtout l’informalite et l occupation de la voie publique .

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Des stratégies concertées seront donc nécessaires pour garantir que les avantages de l’urbanisation soient maximisés tout en atténuant les effets négatifs parmi lesquels un défaut criard d’application de legislation et de règlementation capable  de garantir une urbanisation ordonnée de l espace et de sa gestion.

Le Nouvel Agenda Urbain  adopte à Quito en oct 2016 par les Nations Unies est aujourd’hui le référentiel international auquel s inspirent les États et les villes et autorités territoriales pour élaborer leur politique nationales d urbanisation ainsi que les  législations urbaines qui doivent guider le développement intégré et harmonieux de nos cadres de vie, de travail et de loisirs.

 Ayant visite plusieurs  villes dans le monde et en afrique en particulier, je me suis toujours demandé les raisons profondes pour lesquelles la grande majorité de nos villes et centres urbains était dans un tel etat de chaos,de délabrement ,d informalité ! Au contraire de nos villes, et métropoles et leurs périphéries , pourquoi nos bourgs et villages sont plus propres, mieux planifiés,plus organisés et en général plus respectueux de l’ordre que nos zone urbaines ? 

La réponse serait elle de nature  sociologique du fait du sentiment d’anomie , du désir de deviance et/ou simplement du manque de contrôle social ou de citoyenneté que la personne resent dans l espace urbain comme une   rupture de ban? Alors qu’ au village, tout le monde se connait et que certaines pratiques et attitudes sont immédiatement  réprimandées et même sévèrement   condamnées, la liberté et le sentiment de liberté que procurent  la ville doivent  aussi etre encadres et bâtis sur des normes , des lois et règlements a respecter par tous  et une législation a laquelle tous les citoyens doivent se soumettrent sans exception ! Les passes droits, les prébendes et les protections doivent etre banies si une legislation urbaine doit etre mise en exécution et appliquée efficacement a la satisfaction de tous!

Pendant que nous réfléchissons à bâtir ou à améliorer nos codes d urbanisme, d habitat , d’hygiène et de l environnement , on nous dit souvent qu’en Afrique ,nos pays ne manquent pas  de codes, de lois ou de reglementation, mais la question fondamentale reste leur faible niveau ou  l absence d application et l effectivité sinon l applicabilité des sanctions prévues par ces  lois et règlements . Je me suis souvent demandé les origines de ces comportements répréhensibles ,négatifs et contraires à  l esprit urbain et a l idée  d’une citoyenneté vécu et responsable? Et je me suis posé la question de savoir pourquoi  nos résidents et citoyens sont souvent si réfractaires a l’application des textes de loi et des règlements  en zone urbaine. Certainement le niveau de pauvreté ou le faible niveau d éducation et d alphabétisation ne peuvent pas justifier de tels comportements !

Plusieurs questions nous interpellent par rapport aux lois et règlements que nous édictions pour une gestion efficaces de nos  villes et zones urbaines . Ces lois et règlements sont ils de prime abord connus par les  résidents qui vivent la cité ? Ceux la sont ils réellement des citoyens qui ont droit de cite et qui comprennent les droits et obligations lies au statut de citoyen? Ou sont ils seulement des résidents , des immigrants, et travailleurs saisonniers  “ noraan “ ou même des travailleurs ambulants permanents , qui  souvent habitent la lointaine banlieue des métropoles et qui ont avec la ville qu un sentiment d’usage quotidien, sans aucun souci, aucun devoir ou attachement et responsabilité qui lui confèrent le statut de citoyen ? Les pratiques et les comportements actuelles nous interpellent. Et  si les taux de croissance de la population urbaine se confirment, avec un continent de plus de 500 millions de personnes dans les villes en 2030,  il ya urgence a agir pour doter notre Continent d une législation urbaine que chaque pays devra adapter a sa constitution, a son environnement juridique et institutionnel et la faire appliquer par les autorités territoriales et locales avec une bonne compréhension par les citoyens et tous les habitants sans exception.

Alioune BADIANE, Président de TUTTA, The Urban Think Tank Africa 

Contacts : badianeal@yahoo.com / albadiane2016@gmail.com

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