Dans un contexte de mondialisation et de mobilité constante des biens et des personnes, quasiment aucun pays au monde n’a été épargné par les affres de la Covid-19. En Afrique, cette pandémie a fini de révéler la fragilité de nos micros Etats sur le plan économique et social mais aussi l’échec des politiques publiques en faveur des jeunes et des couches les plus vulnérables. Reportage
Même si le Sénégal a été relativement épargné par la pandémie de la Covid-19, il s’est retrouvé dans des difficultés économiques et alimentaires liées aux goulots d’étranglement dans les chaines de valeur. Selon les conclusions du livre intitulé : Sénégal Post-Covid-19 : souveraineté et rupture, publié en mars 2021, sous la houlette de l’Initiative Prospective Agricole et Rurale (IPAR). A en croire la même source, cette situation met en évidence la fragilité du modèle de la petite économie ouverte adoptée depuis les années 60. Toutefois, les crises ne provoquent pas seulement le chaos. Elles offrent également l’opportunité d’un débat prospectif sur les nouveaux défis, horizons et ambitions collectives d’une nation. Selon la même source, la pandémie de la Covid-19 a exacerbé les défaillances des systèmes politiques et économiques à l’œuvre au Sénégal. Au – delà de la diversité d’approches et de perspectives, des consensus forts sont apparus sur la nécessité d’une refondation du développement centrée sur les souverainetés.
C’est pourquoi, pour le Président d’Horizon Sans Frontière, Boubacar Seye, il faut recadrer le débat dans un contexte mondial de mobilité constante des populations. Car selon lui, le contexte géopolitique actuel met en lumière les dangers multiformes qui menacent à la fois les Etats, les nations et les peuples.
Selon le député de la diaspora, Nango Seck, la Covid-19 a bien impacté sur la communauté sénégalaise vivant à l’étranger surtout en Europe. Heureusement, pour lui, il y a eu l’élan de solidarité entre eux dans les associations et les dahiras. Pour le parlementaire, l’enveloppe de 12 milliards de F Cfa envoyés aux Sénégalais de la diaspora dans le cadre de Force Covid-19 est dérisoire. ‘’Pour moi, ce n’est absolument rien par rapport aux nombres de sénégalais qui vivent à l’étranger surtout en Europe qui a été beaucoup plus impactée par la Covid’’, insiste M. Seck. Et d’ajouter :’’ Sur le plan économique et social, nous vivons toujours les affres de la Covid 19’’. ‘’Petit à petit, nous essayons de nous ressaisir et de prendre la bonne direction mais cela nous a beaucoup impacté cette pandémie’, estime le député à l’assemblée nationale, membre de l’opposition ’. Pour Nango Seck, l’Etat doit comprendre que l’immigration en 2022 n’est plus celle de 1980. ‘’Nous ne sommes pas allés pour cueillir des fruits ou vendre des objets d’art. ‘’Nous cotisons des milliards dans les caisses des pays européens comme en Italie pays dans lequel je vis’’, martèle-t-il. A l’en croire, il faut une politique de réinsertion et une politique migratoire d’intégration.
De l’avis de Mouhamadou Leye, juriste et expert en migration, le mobile premier de la migration c’est d’aller chercher des meilleures conditions de vie. Selon lui, si l’individu ne parvient pas à satisfaire ses besoins primaires dans son pays, son premier reflex c’est d’aller dans un autre pays pour pouvoir gagner correctement sa vie.
Pour M. Leye, au Sénégal, il y a un problème de politique publique concernant l’emploi. Depuis les indépendances, il y a pas mal d’agences ou de directions qui ont été créées pour apporter des réponses claires par rapport à la problématique de l’emploi et à l’employabilité des jeunes. A l’en croire, il y a plus de 250.000 demandeurs d’emplois par an alors que l’Etat ne parvient pas à recruter plus de 20.000 candidats à l’emploi. C’est pourquoi, il estime que la seule alternative aujourd’hui, c’est de travailler sur l’entreprenariat des jeunes afin d’apporter une réponse efficace par rapport à l’immigration irrégulière.
‘’Les tares de la mauvaise gouvernance obstrue les perspectives d’épanouissement des couches les plus vulnérables’’
De l’avis du Président d’Horizon Sans Frontière, le migrant sénégalais fuit la pauvreté chronique, classique, le chômage endémique et les tares de la mauvaise gouvernance qui malheureusement obstrue les perspectives d’épanouissement des couches les plus vulnérables.
Dans un article publié dans la Revue Africaine de Migration Internationales, Doudou Dieye Gueye, Enseignant chercheur à l’Université Assane Seck de Ziguinchor, estime que la pandémie de la Covid-19 a non seulement affecté les migrations sénégalaises mais surtout elle a réussi à ébranler les représentations sociales portées sur le migrant qui pendant très longtemps a été considéré comme un modèle de réussite. Selon lui, la fermeture quasi complète de toutes les frontières du monde pendant la pandémie combinée aux confinements de beaucoup de pays a affecté des secteurs entiers des économies nationales. Et, la migration en tant qu’activité de production économique n’a pas été épargnée de cette situation. Et d’ajouter :’’les déplacements vers l’international en temps normal ont souvent été sources de tensions à fortiori lorsqu’il y a fermeture de frontières, ils deviennent problématiques’’.
C’est pourquoi, Boubacar Seye a estimé qu’il faudrait dans les perspectives de solutions rétablir l’espoir à cette jeunesse. Malheureusement, selon lui, les Etats africains ne parlent pas le même langage. A l’en croire, la migration est pour la plupart une soupape de sureté pour résoudre leur morosité économiquealors qu’on devait pouvoir harmoniser les positions.
Cet article a été réalisé avec le soutien de Article 19 et l’UNESCO, dans le cadre du projet « Autonomiser les jeunes en Afrique à travers les médias et la communication », financé par l’Agence Italienne pour la Coopération au Développement (AICS).